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Auteur : Pascal FEYAERTS Titre : Aspérités
Préface de Jean-Michel Aubevert Illustrations de Catherine Berael |
Aspérités
Tel le « Nu descendant l’escalier » de Marcel Duchamp, le temps semble se rétrécir pour Pascal Feyaerts au mouvement d’un présent arrêté. S’il vit dans le passé, c’est à l’état de deuil. La perte est immanente, constitutive de son état d’esprit. Le présent se dilue dans l’esseulement, ne se connaît à vivre qu’au titre de point de départ d’un futur sans perspective.
Ne reste que le corps pour aspérité sensible, l’âme pelée au vent. Aussi esquisse-t-il à travers le poème la transcendance qui lui permettra de surmonter l’angoisse que suscite en lui l’empilement des jours.
Qu’est-ce qu’un présent, qu’une durée qui ne se connaît plus pour durable, sinon la projection dans l’éternité pour approfondissement de l’instant ?
Reste l’éclat de temps que la fulgurance d’une image fixe dans l’éternel présent, la séduction du « bel aujourd’hui » (Mallarmé).
(Extrait de la préface de Jean-Michel Aubevert)
Qui voudrait partager mes éclats de sable
Quand à peine délivré de ma lèpre quotidienne
Je retrouve à nouveau ce bras de mémoire
Ces gestes d’autrefois et l’inaccoutumance
De mes lèvres à leur destin de peau :
Avant de naître chacun de mes baisers a déjà connu la mort
*
Je me suis assis à côté d'une fontaine. L'eau y était claire, jouissive et l'air était bleu qui se donnait à moi. J’existais, et, elle aussi. Bruyamment, elle m'avait invité à la détente. Seules sous l'air bleu et près de l'eau qui vibrait nos solitudes s'épousaient. Elle coulait claire et limpide aussi incompréhensible qu’un poème de Mallarmé, et cependant si éclatante dans son rythme justifié par la beauté. Trouvant mes abords fréquentables, elle me traversait pourtant sans me voir et je ne la comprenais pas : je n’en avais pas besoin. Je l'aimais parce qu'elle coulait là sous moi et remplissait mon ombre qui la buvait.
ISBN 978-2-3905-2013-9 * 54 pages * 16 €